En raison de l’épidémie de Covid-19, les cabinets qui consentent des dons de matériels sanitaires au profit de certains établissements peuvent exceptionnellement déduire la TVA supportée sur ces produits.
Les règles applicables à l’intéressement et la participation sont modifiées en raison de la crise liée au Covid-19.
En raison de l’épidémie de Covid-19, les professionnels sont autorisés à adresser une facture papier numérisée par courriel, sans envoyer la facture papier correspondante par voie postale, tout en préservant le droit à déduction de la TVA du client.
Compte tenu des difficultés qu’entraîne l’épidémie de Coronavirus aussi bien pour les usagers que pour l’administration fiscale, de nombreux délais en matière de contrôle fiscal sont « gelés » pendant la période d’urgence sanitaire.
1. L’article 11 de la loi d’urgence 2020-290 du 23-3-2020 a autorisé le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance des mesures visant notamment à adapter les délais et procédures administratives et juridictionnelles afin de faire face à l’épidémie de Covid-19 (voir La Quotidienne du 20 mars 2020). Dans ce cadre, plusieurs ordonnances datées du 25 mars 2020 ont été publiées au Journal officiel du 26 (voir La Quotidienne du 27 mars 2020).
Parmi ces ordonnances, l’ordonnance 2020-306 pose un principe général de report des délais qui viennent à échéance au cours d’une période dite « juridiquement protégée », qui s’étendra au moins du 12 mars au 24 juin 2020. Cette ordonnance comporte des mesures spécifiques au contrôle fiscal.
Parallèlement, le Gouvernement a annoncé l’interruption de la mission de contrôle fiscal de la DGFiP. En pratique, pendant toute la durée de la crise sanitaire, l’administration ne devrait lancer aucun nouveau contrôle et n’établir, en principe, aucun nouvel acte de procédure pour les contrôles en cours.
A noter : L’administration vient de publier et de mettre en consultation publique, jusqu’au 13 avril 2020, ses commentaires concernant l’ordonnance 2020-306 (voir La Quotidienne du 7 avril 2020).
Les délais de reprise sont suspendus
2. Les délais imposés à l’administration pour exercer son droit de reprise en vertu des articles L 168 à L 189 du LPF, ainsi que de l’article 354 du Code des douanes, sont suspendus, qu’il s’agisse de la prescription triennale, sexennale ou décennale. La suspension concerne les délais en cours à la date du 12 mars 2020 ou qui auraient dû commencer à courir au cours de la période juridiquement protégée (du 12 mars au 24 juin, en l’état actuel des choses) et qui, en outre, auraient dû expirer au 31 décembre 2020. Ces délais sont suspendus pour une durée égale à la période juridiquement protégée (Ord. 2020-306 art. 10, I-1°). Ils sont donc en pratique prolongés de trois mois et 12 jours si l’état d’urgence n’est pas prorogé.
3. Conformément aux termes de l’ordonnance, l’administration précise que la suspension s’applique non seulement aux rectifications mais également aux intérêts de retard, majorations et amendes (BOI-DJC-COVID19-20 n° 10).
L’administration souligne également que les délais de reprise expirant postérieurement au 31 décembre 2020 ne sont pas concernés par la suspension, quand bien même le contrôle en cours porterait sur plusieurs années dont une pour laquelle le délai de reprise expirerait au 31 décembre 2020 (par exemple 2017, 2018 et 2019 avec application de la prescription triennale) (BOI-DJC-COVID19-20 n° 20).
Suspension des autres délais
4. Les autres délais prévus dans le cadre des procédures de contrôle en matière fiscale sont également suspendus, pour la durée de la période juridiquement protégée. La mesure est d’application large. Elle vise l’ensemble des délais accordés à l’administration et aux contribuables (personnes ou entités) par les dispositions du titre II du LPF (à l’exception des délais de reprise visés au n° 2), c’est-à-dire les délais prévus par les articles L 10 à L 167 du LPF (Ord. 2020-306 art. 10, I-2°).
Sont ainsi susceptibles d’être concernés, pour autant qu’ils soient en cours au 12 mars 2020 ou commencent à courir au cours de la période juridiquement protégée, les délais liés à une procédure de demandes de renseignements, d’éclaircissements ou de justifications, les délais liés à une mise en demeure, les délais relatifs à la durée du contrôle, les délais concernant les propositions de rectification (délai ouvert au contribuable pour répondre à la proposition comme délai ouvert à l’administration pour répondre aux observations du contribuable, délai pour demander la saisine de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires, de la commission départementale de conciliation ou du comité de l’abus de droit fiscal), délais applicables en matière de rescrits…
5. La mesure de suspension vise en outre expressément les délais prévus à l’article L 198 A du LPF en matière d’instruction sur place des demandes de remboursement de crédits de TVA (Ord. 2020-306 art. 10, I-2°).
6. Enfin sont suspendus dans les mêmes conditions et pour la même durée les délais prévus à l’article 32 de la loi 2018-727 du 10 août 2018 dans le cadre de l’expérimentation d’une limitation de la durée globale de l’ensemble des contrôles des PME (Ord. 2020-306 art. 10, I-3°).
© Editions Francis Lefebvre – 2020
La pandémie de Covid-19 et les mesures de confinement adoptées dans la plupart des Etats bouleversent l’exécution des contrats. Quels sont les outils offerts par le droit commun aux cocontractants ? Me Biguenet-Maurel répond aux questions des Editions Francis Lefebvre.
De quels outils disposent les cocontractants pour faire face aux conséquences du Covid-19 ?
Cécile Biguenet-Maurel : Plusieurs ordonnances récentes ont mis en place des mécanismes de report des délais qui arrivent à échéance pendant la période d’état d’urgence sanitaire (pour une étude complète de ces textes, voir le BRDA 8/20 entièrement consacré au Covid-19). Mais ces textes ne couvrent pas toutes les hypothèses. Si un délai quelconque n’entre dans aucun des champs d’application des ordonnances rendues en application de la loi du 23 mars 2020, celui qui n’a pas respecté le délai auquel il était soumis n’aura d’autre choix que d’invoquer le droit commun. On pense par exemple aux délais conventionnellement fixés (qui sont exclus de l’application de l’article 2 de l’ordonnance 2020-306 car non prescrits par la loi ou le règlement) et qui n’entreraient pas dans la catégorie des délais dont les effets sont paralysés par l’article 4 de l’ordonnance 2020-306 (clauses pénales, astreintes…) ou par l’article 5 de la même ordonnance (délai de résiliation ou de dénonciation d’un contrat) ou encore par une ordonnance spécifique distincte.
Pour ces délais qui n’entrent dans aucune des catégories protégées par un régime de report de plein droit, les dispositions de droit commun restent bien évidemment applicables et il peut s’avérer intéressant de les invoquer.
Beaucoup d’auteurs évoquent à ce sujet la force majeure …
C. B-M. : En effet. Si le délai qui n’a pas été respecté n’entre dans aucune des catégories visées par des dispositions spéciales ou n’en remplit pas les conditions d’application, celui qui n’a pas été en mesure d’exécuter son obligation pourra toujours tenter de justifier cette inexécution par l’existence d’un cas de force majeure visé aux articles 1218 et 1231-1 du Code civil.
Aux termes de l’articler 1218, « Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu‘un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur.
Si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1. »
Quant à l’article 1231-1, il précise : « Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure. »
Ces dispositions trouvent évidemment à s’appliquer prioritairement lorsque l’une des obligations principales du contrat n’a pas été respectée dans le délai prescrit.
En effet, lorsque l’exécution du contrat a été empêchée par la force majeure, le cocontractant défaillant est exonéré de sa responsabilité contractuelle (C. civ. art. 1231-1) et le contrat peut être suspendu, voire résolu (C. civ. art. 1218). C’est donc là aussi le moyen d’échapper à l’expiration d’un délai, voire d’obtenir la résolution du contrat dans son entier, si l’empêchement est définitif.
Le Covid-19 pourrait donc constituer un cas de force majeure ?
C. B-M. : Le Covid-19 et les mesures sanitaires qu’il induit constituent incontestablement des événements qui échappent au contrôle des parties. La condition d’extériorité est donc remplie.
Selon la date du contrat, il sera également assez facilement admis que cette crise ne pouvait être raisonnablement prévue. La condition d’imprévisibilité ne posera donc sans doute guère de difficulté, sauf à avoir souscrit une obligation après l’apparition de la pandémie.
En revanche, la question de savoir si l’inexécution de l’obligation par le débiteur était inéluctable, à savoir si la condition d’irrésistibilité est remplie, ne revêt aucun caractère automatique.
La jurisprudence est d’ailleurs relativement stricte dans l’appréciation de la force majeure. Par exemple, une cour d’appel ne saurait retenir qu’un contrat d’entretien est devenu caduc après la fermeture du site d’exploitation pour lequel il a été conclu, sans rechercher si cette fermeture est imputable à un événement de force majeure, car seule la force majeure permet d’écarter le délai conventionnel (Cass. com. 3-3-2015 n° 13-22.573 : RJDA 6/15 n° 407).
La seule fermeture d’un site ne rend donc pas sans objet la poursuite d’un contrat. Et il convient d’apprécier si les circonstances dans lesquelles la fermeture est intervenue ont empêché l’entreprise de respecter le délai de préavis convenu. Pour qu’il en soit ainsi, la fermeture doit présenter les caractéristiques de la force majeure et donc être imprévisible et irrésistible (Cass. 1e civ. 30-10-2008 n° 07-17.134 : RJDA 8-9/09 n° 699 ; Cass. com. 8-3-2011 n° 10-12.807 : RJDA 4/12 n° 398 ; Cass. 3e civ. 1-6-2011 n° 09-70.502 : Bull. civ. III n° 89).
A titre d’exemple, la force majeure a été écartée pour justifier la rupture de contrats de travail sans indemnité en cas d’incendie ayant détruit les ateliers et les stocks d’une entreprise appartenant à un groupe car il n’était pas établi que la reprise de l’exploitation, après reconstruction, était impossible (Cass. soc. 7-12-2005 n° 04-42.907 : RJDA 2/06 n° 201). Jugé de même en cas de destruction partielle d’un village-hôtel occasionnée par le passage d’un cyclone n’ayant pas rendu impossible la reprise de l’exploitation de l’hôtel après remise en état et donc la poursuite du contrat de travail des salariés (Cass. soc. 12-2-2003 n° 01-40.916, 01-40.923 : RJDA 5/03 n° 469). Ne constitue pas nécessairement non plus un événement de force majeure la maladie ou le décès du chef d’entreprise (Cass. soc. 10-2-1982 n° 80-40.044 : Bull. civ. V n° 78 ; Cass. soc. 29-10-1996 n° 93-43.634 : RJDA 5/97 n° 613 ; CA Paris 29-2-1984 : BRDA 9/84 p. 15).
Le Covid-19 ne saurait donc suffire à lui seul à justifier l’inexécution d’un contrat. Encore faut-il prouver que, dans les faits, les mesures sanitaires ont empêché le débiteur de l’obligation de la réaliser, ce qui ne sera pas nécessairement le cas de celles qui peuvent être effectuées à distance, sans risque sanitaire.
Même celui qui aurait contracté le coronavirus ne pourrait invoquer la force majeure sans prouver par ailleurs que celle-ci l’a empêché d’exécuter son obligation de respecter un délai. En effet, la survenance d’une grave maladie n’est pas en soi un cas de force majeure (Cass. 3eciv. 22-1-2014 n° 12-28.246 F-PB : Bull. civ. III n° 6). Elle ne l’est que si elle présente un caractère imprévisible lors de la conclusion du contrat et irrésistible, c’est-à-dire si elle rend impossible l’exécution (Cass. ass. plén. 14-4-2006 n° 04-18.902 P : RJDA 7/06 n° 753).
C’est au cocontractant défaillant qu’il incombe de prouver que l’événement invoqué répond à ces caractéristiques (Cass. com. 17-3-1998 no 95-21.547 D : RJDA 7/98 no 753). C’est donc une appréciation au cas par cas qui sera faite par les tribunaux pour savoir si, au cas d’espèce soumis à son appréciation, l’état d’urgence sanitaire caractérise l’événement de force majeure à l’origine de l’irrespect du délai. Dès lors, il est possible qu’une société qui a poursuivi son activité en télétravail, par exemple, ait du mal à justifier l’irrespect d’un délai conventionnel ou d’une obligation quelconque, dès lors que les moyens techniques (courrier recommandé, par exemple) lui permettaient de s’y conformer.
La force majeure est-elle susceptible d’être invoquée dans tous les contrats ?
C. B-M. : Non : elle peut avoir été écartée ou aménagée par les parties. C’est la raison pour laquelle il convient avant tout de vérifier que le contrat ne contient pas de dispositions dérogatoires.
Les dispositions relatives à l’imprévision fournissent-elles également une solution dans le contexte actuel ?
C. B-M. : L’article 1195 du Code civil prévoit la possibilité d’imposer à la partie adverse l’adaptation du contrat en cas de changement imprévisible de circonstances.
Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l’exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’avait pas accepté d’en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation.
En cas de refus ou d’échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu’elles déterminent, ou demander d’un commun accord au juge de procéder à son adaptation. A défaut d’accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d’une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu’il fixe.
Cet article est applicable aux contrats conclus depuis le 1eroctobre 2016.
Rappelons que l’article 1195 n’est pas applicable aux obligations qui résultent d’opérations sur les titres et les contrats financiers mentionnés aux I à III de l’article L 211-1 du Code monétaire et financier (C. mon. fin. art L 211-40-1 issu de la loi 2018-287 du 20-4-2018 ; Loi précitée art. 16, I-al 1).
Une partie peut donc demander une renégociation du contrat à son cocontractant si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat lui rend l’exécution excessivement onéreuse et si elle n’a pas accepté dans le contrat d’en assumer le risque (C. civ. art. 1195, al. 1).
La force majeure et l’imprévision ont en commun l’imprévisibilité de la survenance d’un événement postérieur au contrat, mais elles se distinguent en ce que la force majeure rend impossible l’exécution du contrat tandis que l’imprévision la rend excessivement onéreuse (Rapp. Sén. n° 22 relatif à la loi 2018-287 du 20-4-2018).
Là encore, plusieurs conditions sont nécessaires pour pouvoir bénéficier de l’article 1195 du Code civil. La condition d’imprévisibilité ne fait aucun doute, sauf à ce que le contrat ait été conclu très récemment.
En revanche, il faut que le changement de circonstances rende l’exécution excessivement onéreuse. Tel n’est pas nécessairement le cas, dès lors que le contrat peut être exécuté sans un surcoût disproportionné. Car le texte exige une exécution devenue « excessivement onéreuse». Il a, par exemple, été jugé qu’un fournisseur ne rapportait pas la preuve de l’augmentation du coût de l’exécution de ses obligations au titre du contrat, ni d’une situation qui aurait altéré fondamentalement l’équilibre des prestations, dès lors qu’il invoquait une augmentation du prix des matières premières de 4 % à 16 % et qu’il évoquait la nécessité corrélative d’augmenter le prix des marchandises facturées à son cocontractant en raison de la diminution de 58 % de sa marge brute (Cass. com. 17-2-2015 n° 12-29.550, 13-18.956, 13-20.230 : RDC 2015 p. 458 obs. Laithier).
Enfin, en pratique, l’imprévision nécessite la mise en œuvre d’une procédure de révision, d’abord amiable. Si les parties n’arrivent pas à renégocier le contrat, elles peuvent d’un commun accord décider de le résoudre à la date ou aux conditions qu’elles déterminent (C. civ. art. 1195, al. 2) ou demander au juge de réviser le contrat ou d’y mettre fin (C. civ. art. 1195, al. 2). Mais il faut savoir que le demandeur à la révision doit continuer à exécuter ses obligations jusqu’à l’expiration de la négociation qu’il a provoquée (C. civ. art. 1195, al. 1), à moins bien sûr que le changement de circonstances ait rendu l’exécution du contrat impossible. Mais on est alors dans un cas qui se rapproche plus de la force majeure que de l’imprévision.
Par Cécile BIGUENET-MAUREL, Avocate au sein du Cabinet MB Justitia
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Précisions des Urssaf sur le nouveau report de cotisations pour les entreprises
L’échéance Urssaf du 15 avril peut être reportée mais pas la DSN
Dans un communiqué du 3 avril 2020, le ministre de l’action et des comptes publics a annoncé le prolongement des mesures de report des cotisations pour les échéances sociales du mois d’avril (voir La Quotidienne du 9 avril 2020). Le réseau des Urssaf indique les modalités pratiques de ce report, notamment en ce qui concerne la DSN, dans une actualité publiée sur son site internet le 7 avril 2020.
Ainsi, les employeurs dont la date d’échéance Urssaf intervient le 15 avril à 12 h peuvent reporter tout ou partie du paiement de leurs cotisations salariales et patronales pour l’échéance du 15 avril 2020. Ce report des cotisations n’est pas automatique et suppose une action pour modifier l’ordre de paiement ou le virement.
Même en cas de report des cotisations, la DSN est à transmettre jusqu’au mercredi 15 avril 12h00.
Il est précisé que, pour les employeurs ne disposant pas de tous les éléments requis pour réaliser une paie complète et déposer une DSN complète et conforme à cette date, il faut malgré tout transmettre la DSN établie à partir des informations en leur possession. Dans ce cas, ils pourront effectuer les régularisations nécessaires dans la paie au titre de la période d’emploi d’avril 2020, dont la DSN sera transmise à échéance du 15 mai 2020, et aucune pénalité ne sera décomptée par l’Urssaf.
En cas de difficultés majeures, les employeurs pourront également reporter tout ou partie du paiement des cotisations salariales et patronales pour cette échéance. La date de paiement de ces cotisations sera reportée d’office jusqu’à 3 mois dans l’attente de convenir avec les organismes des modalités de leur règlement. En pratique, les employeurs peuvent moduler leur paiement en fonction de leurs besoins : montant à 0, ou montant correspondant à une partie des cotisations.
Plusieurs cas de figure sont envisagés :
– si la DSN de mars 2020 n’a pas encore été effectuée, il est possible de la transmettre jusqu’au 15 avril. Si l’employeur est en paiement trimestriel et souhaite revenir sur le montant des ordres de paiement Sepa éventuellement émis dans les DSN de janvier et de février, la méthode à suivre est indiquée dans un document accessible en ligne ;
– si la DSN a été transmise, il est possible de la modifier en déposant une DSN « annule et remplace » jusqu’au jour précédant l’échéance inclus (soit le 14 avril 23h59), ou en utilisant le service de paiement de l’espace en ligne Urssaf. Si l’employeur est en paiement trimestriel et souhaite revenir sur le montant des ordres de paiement Sepa éventuellement émis dans les DSN de janvier et de février, la méthode à suivre est indiquée dans le document précité ;
– en cas de règlement des cotisations hors DSN, il est possible d’adapter le montant du virement bancaire ou bien de ne pas effectuer de virement.
A noter : Si l’employeur ne souhaite pas opter pour un report de l’ensemble des cotisations et qu’il peut régler les cotisations salariales, il peut échelonner le règlement des cotisations patronales, comme habituellement. Pour cela, il faut se connecter à son espace en ligne sur urssaf.fr puis signaler sa situation via la messagerie : « Nouveau message », « Une formalité déclarative », « Déclarer une situation exceptionnelle ». Il est également possible de joindre l’Urssaf par téléphone au 3957.
Un report possible aussi pour les cotisations de retraite complémentaire
Pour rappel, un report ou un accord de délai est également possible pour les cotisations de retraite complémentaire : voir La Quotidienne du 6 avril 2020.
Les Urssaf en appellent à la responsabilité des entreprises
Le réseau des Urssaf indique que, dans le contexte actuel, où notre système de soins et plus largement notre protection sociale et l’action de l’Etat sont plus que jamais sollicités, il est important que les entreprises qui le peuvent continuent à participer au financement de la solidarité nationale. Il appelle donc les entreprises à faire preuve de responsabilité dans l’usage des facilités qui leur sont accordées, afin qu’elles bénéficient avant tout aux entreprises qui en ont besoin.
Garantie des créances salariales par I’AGS : les délais sont adaptés en raison de l’épidémie
Prise en application de la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19, l’ordonnance 2020-341 du 27 mars 2020 visant à adapter les règles relatives aux difficultés des entreprises et des exploitations agricoles à l’urgence sanitaire contient notamment des dispositions relatives à la prise en charge des créances salariales par l’AGS en cas de procédure collective. Les dispositions de cette ordonnance ont été explicitées par une circulaire du ministère de la justice du 30 mars 2020.
Une prise en charge plus rapide des créances salariales par l’AGS
En application de l’article 1, l, 2° de l’ordonnance, les relevés des créances résultant d’un contrat de travail sont transmis sans délai par le mandataire judiciaire à l’AGS. Les dispositions des articles L 625-1, al. 1er et L 625-2 du Code de commerce prévoyant de soumettre les relevés de créances au représentant des salariés et d’obtenir le visa du juge-commissaire ne sont pas pour autant écartées mais elles s’appliquent sans avoir pour effet d’allonger le délai de transmission à l’AGS.
Ainsi, selon l’administration, ces dispositions permettent d’accélérer le traitement par l’AGS des relevés des créances salariales établis par le mandataire judiciaire, sous sa responsabilité. Ces relevés peuvent être transmis à l’AGS sans attendre l’intervention du représentant des salariés ni le visa du juge-commissaire (Circ. II, 1° , b).
Des conditions de prise en charge adaptées au contexte actuel
Dans un contexte normal, l’article L 3253-8 du Code du travail prévoit la garantie par l’AGS de certaines sommes dues aux salariés, dans les conditions suivantes :
– créances résultant de la rupture du contrat de travail : la rupture doit intervenir dans le mois suivant le jugement qui arrête un plan de sauvegarde, de redressement ou de cession ; dans les 15 jours, ou 21 jours lorsqu’un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) est élaboré, suivant le jugement de liquidation ; pendant le maintien provisoire de l’activité autorisé par le jugement de liquidation judiciaire et dans les 15 jours, ou 21 jours lorsqu’un PSE est élaboré, suivant la fin de ce maintien de l’activité ;
– lorsque le tribunal prononce la liquidation judiciaire, les sommes dues aux salariés dans la limite d’un montant maximal correspondant à un mois et demi de travail (soit 45 jours) : au cours de la période d’observation ; au cours des 15, ou 21 jours lorsqu’un PSE est élaboré, suivant le jugement de liquidation ; au cours du mois suivant le jugement de liquidation pour les représentants des salariés prévus par le Code de commerce ; pendant le maintien provisoire de l’activité autorisé par le jugement de liquidation et au cours des 15 jours, ou 21 jours lorsqu’un PSE est élaboré, suivant la fin de ce maintien de l’activité.
Ces limites de garantie, très strictes, sont aménagées. En application de l’article 2, II, 2° et 3° de l’ordonnance, sont ainsi prolongées, jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire, d’une durée équivalente, les délais et durées mentionnés ci-dessus.
Exemple : Si la rupture du contrat de travail d’un salarié intervient plus de 15 jours après le jugement qui prononce la liquidation judiciaire, mais avant l’expiration du délai correspondant à la durée de la période de « protection juridique » (c’est-à-dire la période englobant l’état d’urgence + 1 mois), les indemnités de rupture pourront être prises en charge par l’AGS, et la limite de 45 jours sera portée à une durée incluant ladite période (Circ. II, 2°, b).
Ord. 2020-341 du 27-3-2020 : JO 28 ; Circ. CIV/03/20 du 30-3-2020 : BO 1-4
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Le paiement des cotisations sociales personnelles dues par les professionnels libéraux le 20 avril est automatiquement annulé.
Pour permettre aux huissiers de justice de poursuivre leur activité malgré la crise sanitaire actuelle, la Chambre nationale des commissaires de justice a facilité le recours aux outils numériques.
Quand tout va bien, tout est simple !
Juridiquement, la loi sur les sociétés commerciales fixe le montant maximum du bénéfice distribuable à la somme des résultats de l’année passée et des réserves disponibles existant à la fin de l’année passée dans les capitaux propres de l’entreprise (voir Mémento Comptable n° 53965). Dans ce cadre, les dividendes distribués ne peuvent pas être considérés comme des dividendes fictifs (Mémento Comptable n° 82430).
Financièrement, comme le droit précité les y incite, les organes de direction des entreprises proposent aux associés de leur distribuer un montant de dividendes en lien avec la performance de l’année passée traduite dans les résultats des comptes. Lors de l’assemblée générale (AG) qui doit se tenir dans les 6 mois qui suivent la clôture de l’exercice, les associés, après avoir approuvé les comptes de l’année passée, approuvent ce montant de distribution.
Ainsi, il y a donc bien, en général, une corrélation très étroite entre les résultats de l’année passéeet la décision de distribution de dividendes l’année suivante. Cette même corrélation existe en fin d’année passée lors de la décision de verser à leurs salariés des primes de fin d’année pour améliorer leur motivation et fidélisation.
Cette corrélation permet une répartition de la richesse de l’entreprise entre les salariés, les associés et, bien sûr, les futurs investissements à effectuer.
Autrement dit, quand tout va bien, on ne se rend pas forcément compte que l’AG est un événement de l’année suivante tellement elle est rattachée à l’activité de l’année écoulée et donc que la distribution est en pratique souvent « automatique ».
Pour certains, le Covid-19 ne change pas la donne pour la distribution de dividendes 2020 !
En ce sens, on notera que la comptabilité a considéré que les bons résultats 2019 devaient rester bons, c’est-à-dire ne pas tenir compte des impacts futurs négatifs du Covid-19.
En effet, bien que le nom attribué au virus par l’OMS indique « 19 », les comptables du monde entier ont néanmoins considéré que le Covid-19 constituait un événement post clôture 2019, donc un événement 2020, en se fondant sur les décisions de cette même OMS du mois de janvier qui démontrent une absence de lien entre l’année 2019 et l’apparition du Covid-19… ce qui a eu pour conséquence que les bilans et les comptes de résultat 2019 ont été arrêtés sans prendre en compte les éventuels impacts négatifs du Covid-19, par exemple sur l’évaluation des immobilisations incorporelles et corporelles ou les passifs (voir FRC 4/20 inf 1).
Dès lors, en droit des sociétés, comme indiqué ci-dessus, distribuer en 2020 des dividendes en fonction des bons résultats comptables 2019 ne peut aboutir, sauf pertes antérieures, à une distribution de dividendes fictifs.
Enfin, en termes de partage de richesses de l’entreprise, les salariés ont bien déjà touché en décembre 2019 ou en janvier 2020 des primes de fin d’année correspondant aux bons résultats de l’année 2019. Quoi de plus équitable alors que de distribuer aux associés en 2020 de bons dividendes fondés sur ces bons résultats 2019 … et ce d’autant plus qu’ils voient depuis un mois leurs actions chuter très lourdement comme jamais !
Autrement dit, on pourrait défendre que, malgré la « guerre » survenue début 2020, le caractère « automatique » précité des distributions de dividendes se poursuive en 2020 comme si tout allait bien !
Au contraire, le Covid-19 prouve que l’AG 2020, postérieure à celui-ci, est un vrai événement 2020
Mais pour n’importe quelle personne sensée, il est impossible d’être « en guerre » et de faire comme si le Covid-19 n’existe pas face à la multitude d’impacts négatifs sur l’activité des entreprises, les emplois, les baisses de rémunérations envisagées, les mesures gouvernementales, ou bien encore face à la diversité des incertitudes en termes de reprise liées à la méconnaissance de la fin de vie du Covid-19, aux bouleversements possibles des activités et des économies, aux différentes évolutions dans les régions du monde (la moitié de l’Humanité est, rappelons-le, confinée) ou à la diversité des scénarios.
Autrement dit, s’il résulte de la comptabilité que la « guerre » est un événement 2020 sans lien avec 2019, toute décision à prendre par les dirigeants et les AG après son déclenchement constitue nécessairement un événement 2020 qui devrait en tenir compte. Et la distribution de dividendes 2020, qui est dans ce cas, ne peut donc y échapper !
D’ailleurs, en pratique, tout démontre que la distribution de dividendes 2020 est un événement 2020 post Covid-19 :
– Existe-t-il une dette de l’entreprise vis-à-vis de ses associés au 31 décembre 2019, lui imposant de leur faire profiter des bons résultats 2019 ? Non ! La distribution de dividendes de 2020 n’aura aucune incidence sur les comptes 2019 car il n’existe aucun droit de créance des associés sur l’entreprise à cette date. Donc, l’entreprise est totalement libre de réduire ou supprimer les dividendes en 2020 si elle le souhaite, malgré les bons résultats 2019.
– L’information obligatoire très détaillée à fournirdans l’annexe des comptes et le rapport de gestion 2019 sur les différents impacts possibles du Covid-19 (voir FRC 4/20 inf 1) serait-elle inutile ? Non ! Au contraire, son seul but est d’alerter tout lecteur des comptes 2019 sur le fait que, même si les bons résultats 2019 reflétés par le bilan et le compte de résultat 2019 sont justes, ils peuvent amener à prendre des décisions erronées en 2020 comme celle portant sur la distribution de dividendes à prendre lors de l’AG 2020.
– L’AMF a déjà rappelé à deux reprises au mois de mars que les sociétés cotées sont soumises à l’obligation de fournir une information permanente, et donc, au-delà même du rapport de gestion souvent daté de mi-février, qu’elles sont dans l’obligation de compléter les précisions portant sur les impacts ou incertitudes liés au Covid-19. Ce qui entraîne et entraînera de nombreux communiqués de presse visant non seulement à fournir ces informations, mais à modifier des résolutions également déjà prises concernant les distributions de dividendes 2020 (annulations, report de la décision, etc.).
– De nombreuses aides gouvernementales ont été prises en faveur des entreprises depuis l’arrivée du Covid-19, notamment pour le chômage partiel, les décalages de paiement de charges et d’impôts, les prêts ou facilités de prêts.
– Le communiqué du Ministre des Finances du 2 avril 2020 demande un « Engagement de responsabilité pour les grandes entreprises bénéficiant de mesures de soutien en trésorerie » visant à ne pas verser des dividendes en 2020 et à ne pas procéder à des rachats d’actions au cours de l’année 2020.
– Les ordonnances du 25 mars 2020 permettent spécifiquement et de manière inédite à toute société commerciale de décaler la tenue des AG 2020 jusqu’au 30 septembre au lieu du 30 juin 2020 pour approuver les comptes 2019, entraînant alors, de fait, un décalage de la décision de distribuer et du versement d’éventuels dividendes.
Conclusion : le principe de précaution devrait s’appliquer à tous les dividendes 2020
Si, comme démontré ci-dessus l’AG est un véritable événement 2020, c’est-à-dire une « situation de guerre » à la suite du Covid-19 sans lien direct avec les bons résultats 2019, comment ne pas conclure, quand bien même les distributions de dividendes sont juridiquement possibles, que le principe de précaution devrait s’appliquer à toutes les distributions de dividendes 2020 ?
Ceci dit, reste à savoir comment ce principe de précaution doit s’appliquer et s’il doit s’appliquer de la même manière à toutes les sociétés. La réponse est évidemment négative car les entreprises ne se trouvent pas toutes dans les mêmes situations, sans parler qu’il existe des distributions externes et des distributions intragroupe.
Mais, même si ces situations sont multiples, les grands concepts suivants en matière de précaution devraient d’une manière ou d’une autre les couvrir :
a. La distribution n’étant pas une obligation, si l’entreprise a trop de doutes face aux incertitudes, elle ne devrait pas distribuer.
b. La distribution ne peut remettre en cause la continuité de l’exploitation … qui doit d’ailleurs s’apprécier jusqu’à la date de l’AG.
c. La distribution ne doit pas aggraver la situation de trésorerie.
d. La distribution ne doit pas être suivie de licenciements, même ceux que l’entreprise ne connaît pas aujourd’hui (ce qui peut revenir aux incertitudes précitées au point a.).
e. La distribution ne doit pas mettre en péril les initiatives de relance et les investissements de demain post Covid-19 (ce qui peut également revenir aux incertitudes précitées au point a.).
f. La distribution devrait s’inscrire dans le prolongement de la stratégie déjà retenue actuellement par l’entreprise pour aider à la lutte contre le Covid-19, qu’elle soit financière ou extra financière.
g. L’entreprise se doit d’être exemplaire, son risque le plus fort étant celui de la réputation car elle impacte l’affection des clients pour la marque de l’entreprise, la confiance des investisseurs (actionnaires et financeurs) et l’engagement des salariés.
Dans ce cadre, les grandes entreprises ayant bénéficié du soutien de l’Etat en matière de trésorerie se doivent de respecter leurs engagements
h. Quelle que soit sa décision, maintien-réduction-suppression des dividendes 2020, l’important pour l’entreprise sera de la justifier, c’est-à-dire de montrer qu’elle aura été prudente, responsable et solidaire.
© Editions Francis Lefebvre – 2020
Pour faire face à l’épidémie de Covid-19, une ordonnance du 25 mars 2020 prévoit les conditions dans lesquelles l’employeur peut imposer la prise de congés payés et de jours de repos. Elle autorise également, dans certains secteurs d’activité, des dérogations aux durées maximales de travail.
L’article 11 de la loi 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 a autorisé le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures permettant notamment à l’employeur d’imposer la prise de congés payés ou de jours de repos et, pour les entreprises des secteurs « particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation et à la continuité de la vie économique et sociale », de déroger aux règles d’ordre public et aux stipulations conventionnelles relatives à la durée du travail, ainsi qu’au repos hebdomadaire et au repos dominical.
L’ordonnance 2020-323 du 25 mars 2020 est entrée en vigueur immédiatement, soit le 26 mars 2020 (Ord. art. 8). Elle doit faire l’objet d’un projet de loi de ratification.
Congés payés
L’article 1er de l’ordonnance 2020-323 du 25 mars 2020 déroge temporairement aux dispositions légales et conventionnelles en matière de congés afin de tenir compte de la propagation du Covid-19 et de ses conséquences économiques, financières et sociales.
Des dérogations au droit commun
L’ordonnance autorise les partenaires sociaux à déroger, par voie d’accord collectif, aux dispositions du Code du travail relatives aux congés payés figurant sous la section 3 portant sur la prise des congés (articles L 3141-12 à L 3141-23, D 3141-5 et D 3141-6) et sous la section 2 concernant la durée du congé (articles L 3141-3 à L 3141-11 ; D 3141-3 et R 3141-4), ainsi qu’aux stipulations conventionnelles en vigueur au niveau de l’entreprise, de l’établissement ou de la branche (Ord. art 1er, al. 1).
Pour mémoire : le Code du travail prévoit les dispositions suivantes.
La période de prise des congés et l’ordre des départs pendant cette période sont fixés par un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche (art. L 3141-15). En l’absence de telles dispositions conventionnelles, la période de congés et l’ordre des départs sont fixés par l’employeur, après avis du CSE (art. L 3141-16).
Qu’elle soit fixée par accord ou unilatéralement par l’employeur, la période de prise des congés comprend obligatoirement la période du 1er mai au 31 octobre de chaque année, cette disposition étant d’ordre public (C. trav. art. L 3141-13). Elle doit être portée à la connaissance des salariés au moins 2 mois avant son ouverture, délai d’ordre public, c’est-à-dire au plus tard le 1er mars, si elle commence le 1er mai (art. D 3141-5).
Chaque salarié est ensuite informé individuellement de ses dates de vacances au moins un mois à l’avance, délai de prévenance d’ordre public également (art. D 3141-6).
L’employeur peut modifier les dates de congés payés à condition de respecter un délai de prévenance fixé par l’accord collectif précité (C. trav. art. L 3141-15). À défaut, ce délai est d’un mois avant la date de départ initialement prévue (art. L 3141-16).
Toutefois, des circonstances exceptionnelles autorisent l’employeur à changer les dates de vacances moins d’un mois avant la date prévue (art. L 3141-16).
Des dérogations possibles par voie d’accord d’entreprise ou, à défaut, de branche
La faculté d’imposer ou de modifier les congés payés des salariés est subordonnée à la conclusion d’un accord d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche (Ord. art 1er, al. 1).
A notre avis : L’accord doit être négocié et conclu selon les dispositions de droit commun.
L’ordonnance retient la primauté de l’accord d’entreprise sur l’accord de branche, comme le prévoit l’article L 2253-3 du Code du travail. Selon cet article, l’accord d’entreprise, qu’il soit conclu avant ou après l’accord de branche, prime sur ce dernier.
Aussi, si un accord d’entreprise définit la période habituelle des congés payés dans l’entreprise, l’accord de branche conclu en application des dispositions dérogatoires temporaires de l’ordonnance ne devrait pas s’appliquer sur les points contredits par l’accord d’entreprise.
Dans ce contexte particulier que n’avait pas envisagé cet accord d’entreprise, l’employeur pourrait avoir intérêt à négocier et conclure un avenant à durée déterminée à l’accord d’entreprise pour prévoir les mesures exceptionnelles relatives aux congés payés.
L’employeur pourrait imposer jusqu’à 6 jours de congés
L’accord doit fixer les conditions dans lesquelles l’employeur est autorisé, dans la limite de 6 jours de congés et sous réserve de respecter un délai de prévenance qui ne peut être réduit à moins d’un jour franc, à décider de la prise de congés payés ou modifier unilatéralement les dates de prise des congés (Ord. art 1er, al. 1).
A noter : À ces 6 jours, il faut ajouter les 10 jours qui correspondent au cumul de jours de repos ou de RTT et des droits affectés sur le CET dont l’employeur peut imposer la prise ou modifier les dates.
Il appartient donc aux partenaires sociaux de négocier :
– le nombre de jours de congés laissés à la disposition de l’employeur, l’accord pouvant fixer un nombre inférieur à 6. Selon le rapport au Président de la République, la limite de 6 jours s’entend de 6 jours ouvrables, soit une semaine de congés payés ;
– le délai de prévenance des salariés concernés qui ne peut être réduit à moins d’un jour franc.
A notre avis : L’accord pourrait utilement préciser d’autres conditions : modalités d’information des salariés (rappelons que le délai de prévenance s’apprécie à la date de remise au salarié de la lettre modifiant son départ en congés et non à sa date d’envoi : Cass. soc. 4-3-2003 n° 00-45.410 F-D), modalités d’information du CSE, définition de la période de congés imposée ou modifiée, période de prise des congés et ordre des départs dérogatoires (ce dernier est un thème de négociation légal : C. trav. art. L 3141-15).
Les jours de congés imposés par l’employeur doivent être des jours de congés payés acquis par le salarié, y compris avant l’ouverture de la période au cours de laquelle ils ont normalement vocation à être pris (Ord. art 1er, al. 1).
A noter : Il s’agit là d’autoriser l’employeur à imposer au salarié la prise anticipée des congés payés, c’est-à-dire avant l’ouverture de la période de congés. Rappelons que, dans le cadre du droit commun, la Cour de cassation s’est opposée à cette faculté, même pour tenter de limiter le recours à l’activité partielle (Cass. soc. 19-6-1996 n° 93-46.549 D, Sté Vetsout c/ B.).
Dans les entreprises non soumises à un accord collectif conclu en application de l’article L 3141-10 du Code du travail et qui appliquent donc la période légale, cette possibilité d’imposer les jours de congés payés concerne donc le reliquat des congés acquis à prendre avant le 31 mai 2020 mais également les nouveaux congés acquis du 1er juin 2019 au 31 mai 2020 et qui pourront être pris avant l’ouverture de la période au cours de laquelle ils ont normalement vocation à être pris (soit à compter du 1er juin 2020).
L’accord peut permettre d’imposer le fractionnement des congés
L’accord peut autoriser l’employeur à fractionner les congés sans être tenu de recueillir l’accord du salarié (Ord. art 1er, al 2).
A noter : Il s’agit là d’une dérogation aux dispositions d’ordre public de l’article L 3141-19 du Code du travail selon lesquelles lorsque le congé principal est d’une durée supérieure à 12 jours ouvrables, il peut être fractionné avec l’accord du salarié.
L’ordonnance ne précise pas clairement si l’employeur est autorisé à fractionner le congé principal lorsque le salarié a acquis moins de 12 jours ouvrables, par dérogation aux dispositions de l’article L 3141-18 dudit Code. En faveur de la possibilité d’autoriser l’employeur à imposer un fractionnement dans ce cas, nous relevons que l’ordonnance permet de déroger à l’ensemble des dispositions relatives aux congés payés figurant sous la section 3, y compris donc à l’article L 3141-18 précité.
L’ordonnance ne précise pas non plus si le fractionnement est autorisé à l’occasion de la prise ou de la modification des 6 jours de congés laissés à la discrétion de l’employeur ou s’il s’agit d’une faculté pouvant concerner l’ensemble des congés payés acquis, pendant une période supérieure à l’état d’urgence sanitaire.
À notre sens, dès lors que l’ordonnance autorise la période de congés imposée ou modifiée en application du présent article à s’étendre jusqu’au 31 décembre 2020, l’employeur pourrait être autorisé à fractionner les congés sans l’accord des salariés pendant toute la période d’application négociée.
La durée d’application de la faculté de fractionnement devrait pouvoir être négociée.
Les couples pourraient être privés de congés simultanés
L’accord peut autoriser l’employeur à fixer les dates des congés sans être tenu d’accorder un congé simultané à des conjoints ou des partenaires liés par un pacte civil de solidarité travaillant dans son entreprise (Ord. art 1er, al 2).
Selon le rapport au Président de la République sur l’ordonnance 2020-323, cette mesure permettra au cas où la présence d’un des deux conjoints seulement est indispensable à l’entreprise, ou si l’un des deux conjoints a épuisé ses droits à congés, de dissocier les dates de départ en congés.
L’ordonnance précitée ne précise pas clairement les limites temporelles de cette dérogation. L’accord pourrait clarifier ce point.
Période d’application
La période de congés imposée ou modifiée en application du présent article ne peut s’étendre au-delà du 31 décembre 2020 (Ord. art 1er, al 3).
A notre avis : L’ordonnance 2020-323 ne précise pas si l’accord peut permettre d’imposer la prise ou la modification des 6 jours de congés au plus uniquement pendant la période d’urgence sanitaire ou bien au-delà de cette période. À défaut de précision contraire, ces mesures ont vocation à s’appliquer jusqu’au 31 décembre 2020 ou jusqu’au terme défini par les partenaires sociaux. L’accord pourrait définir la durée d’application des dispositions dérogatoires prévues par les alinéas 1 et 2 de l’article 1er de l’ordonnance.
Jours de RTT et de repos
Les entreprises en difficultés économiques peuvent imposer la prise de jours de repos…
Certains dispositifs légaux et conventionnels permettent aux salariés de poser à leur convenance, en sus des congés payés, des jours de repos ou de réduction du temps de travail (RTT). C’est le cas en particulier des salariés bénéficiant d’un aménagement du temps de travail, d’une convention de forfait en jours et/ou d’un compte épargne-temps.
Les articles 2 à 5 de l’ordonnance du 25 mars 2020 prévoient la possibilité pour l’employeur de déroger aux règles légales et conventionnelles applicables à ces dispositifs et d’imposer la prise de jours de repos aux salariés en bénéficiant ou de modifier leurs dates.
Aménagement du temps de travail sur plusieurs semaines
Les jours de repos ou de RTT concernés sont ceux accordés dans le cadre d’un dispositif d’aménagement du temps de travail sur plusieurs semaines ou d’un accord ou convention collective de réduction du temps de travail maintenu en vigueur en application de la loi du 20 août 2008.
L’article 2 de l’ordonnance autorise l’employeur à :
– imposer la prise, à des dates déterminées par lui, de jours de repos normalement au choix du salarié acquis par ce dernier ;
– modifier unilatéralement les dates de prise de jours de repos.
Convention de forfait en jours
Un nombre de jours de repos est déterminé chaque année pour les salariés soumis à une convention de forfait en jours afin de respecter le nombre de jours travaillés prévu par la convention de forfait.
L’article 3 de l’ordonnance permet à l’employeur de :
– décider de la prise, à des dates déterminées par lui, de jours de repos prévus par une convention de forfait ;
– modifier unilatéralement les dates de prise de jours de repos prévus par une convention de forfait.
Exemple : Pour une entreprise octroyant les 5 semaines de congés payés légaux ayant conclu avec un salarié une convention de forfait sur la base de 218 jours, le nombre de jours de repos pour l’année 2020 s’élève à 228 (366 jours moins 104 samedis et dimanches, moins 9 jours fériés tombant un jour travaillé et moins 25 jours de congés payés) – 218 = 10 jours. L’employeur pourra, sous réserve des conditions exposées n° 6, fixer seul des dates de pose de ces 10 jours de repos, pour la période allant jusqu’au 31 décembre 2020. Si le salarié a prévu de les prendre, en accord avec l’employeur, du 18 au 29 mai 2020, l’employeur pourra, par exemple, lui imposer de les prendre plutôt du 6 au 20 avril (à supposer que le lundi de Pâques soit habituellement chômé dans l’entreprise).
Compte épargne-temps
Les salariés bénéficiant d’un compte épargne-temps peuvent l’alimenter en temps (jours de repos, congés payés…) ou en argent. Les droits affectés peuvent être utilisés, dans les conditions définies par l’accord ou la convention collective, pour obtenir par exemple un complément de rémunération, alimenter leur épargne retraite ou se faire indemniser des périodes d’absence. En principe, l’employeur ne peut pas imposer au salarié l’utilisation de ses droits, sauf pour les heures de travail affectées sur le CET à son initiative.
L’article 4 de l’ordonnance octroie à l’employeur la faculté d’imposer l’utilisation des droits affectés sur le compte épargne-temps du salarié par la prise de jours de repos, dont il détermine les dates.
En revanche, les salariés ont, à notre sens, toujours la possibilité d’affecter des jours de repos ou de congés payés sur le CET dans les limites admises par l’accord collectif et sous réserve que l’employeur n’ait pas imposé la pose de ces jours.
Exemple : Si un salarié a déjà, par le passé, placé 20 jours de congés payés et 15 jours de RTT, l’employeur pourra le contraindre à en utiliser 10 au plus d’ici au 31 décembre 2020.
… sous réserve de remplir certaines conditions
Pour imposer la pose ou la modification des dates de prise des jours de repos, l’employeur doit remplir plusieurs conditions :
– l’intérêt de l’entreprise doit le justifier eu égard aux difficultés économiques liées à la propagation du Covid-19 (art. 2 à 4) ;
– un délai de prévenance d’au moins un jour franc doit être respecté (art. 2 à 4) ;
– le nombre total de jours de repos dont l’employeur peut imposer au salarié la prise ou dont il peut modifier la date ne peut être supérieur à 10 (art. 5) ;
– la période de prise de repos imposée ou modifiée ne peut pas s’étendre au-delà du 31 décembre 2020 (art. 3 et 4) ;
– le comité social et économique doit être informé sans délai et par tout moyen (Ord. 2020-389 du 1-4-2020 art. 7).
Le CSE a un mois à compter de l’information de l’employeur pour rendre son avis. Le comité peut rendre son avis après l’usage par l’employeur de sa faculté d’imposer la pose ou la modification des dates de jours de repos (Ord. 2020-389 du 1-4-2020 art. 7).
A noter : À ces 10 jours, qui correspondent au cumul de jours de RTT et des droits affectés sur le CET, il faut ajouter les 6 jours de congés payés dont l’employeur peut imposer la prise ou modifier les dates. À la différence des congés payés toutefois, l’employeur peut décider unilatéralement, sous réserve de respecter les conditions précitées, de la pose ou de la modification des dates de prise des jours de repos, sans qu’aucun accord d’entreprise ou de branche l’y autorise. S’agissant du CSE, on relèvera qu’il doit être consulté, mais que cette consultation peut avoir lieu a posteriori.
Durées maximales de travail
Les entreprises essentielles à la Nation peuvent déroger aux durées maximales de travail…
L’article 6 de l’ordonnance autorise en outre les entreprises relevant de secteurs d’activité particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation et à la continuité de la vie économique et sociale à déroger aux durées maximales de travail légales et, le cas échéant, aux stipulations conventionnelles applicables.
Les dérogations cesseront toutefois de produire leurs effets le 31 décembre 2020.
A noter : La liste des secteurs particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation et à la continuité de la vie économique et sociale sera prochainement fixée par décret. Selon le ministère du travail, seront probablement concernés les secteurs de l’énergie, des télécommunications, de la logistique, des transports, de l’agriculture et de l’agroalimentaire.
Ainsi, ces entreprises peuvent :
– porter la durée quotidienne maximale de travail, fixée à 10 heures, jusqu’à 12 heures ;
– porter la durée quotidienne maximale de travail accomplie par un travailleur de nuit jusqu’à 12 heures (contre 8 heures) ;
– réduire la durée de repos quotidien, fixée à 11 heures, jusqu’à 9 heures consécutives, sous réserve de l’attribution d’un repos compensateur égal à la durée du repos dont le salarié n’a pas pu bénéficier ;
– porter la durée hebdomadaire maximale absolue jusqu’à 60 heures (contre 48 heures) ;
– porter la durée hebdomadaire de travail calculée sur une période quelconque de 12 semaines consécutives (ou 12 mois pour certains employeurs ayant une activité agricole), fixée à 44 heures, jusqu’à 48 heures ;
– porter la durée hebdomadaire de travail du travailleur de nuit calculée sur une période de 12 semaines consécutives jusqu’à 44 heures (contre 40 heures).
…selon des modalités différentes au regard de leur secteur d’activité
Un décret à paraître fixera pour chacun des secteurs d’activité concernés les catégories de dérogations admises parmi celles mentionnées et, dans le respect des limites qu’elles fixent, la durée maximale de travail ou la durée minimale de repos qui peut être fixée par l’employeur.
L’employeur qui use d’au moins une de ces dérogations en informe sans délai et par tout moyen le comité social et économique ainsi que le Direccte.
Le CSE a un mois à compter de l’information de l’employeur pour rendre son avis. Le comité peut rendre son avis après l’usage par l’employeur de l’une ou plusieurs dérogations précitées (Ord. 2020-389 du 1-4-2020 art. 7).
© Editions Francis Lefebvre – 2020
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