COVID19 – Alternance et formation professionnelle

Une ordonnance détermine des dispositions spécifiques en matière de formation professionnelle afin de permettre aux employeurs et aux acteurs de la formation de remplir leurs obligations légales dans le contexte de la crise sanitaire liée à la propagation du Covid-19.

Prise en application de la loi 2020-290 du 23 mars 2020, l’ordonnance 2020-387 du 1er avril 2020 prévoit un certain nombre de mesures visant à faire face à l’épidémie de Covid-19 en cours en matière de contrats d’apprentissage et de professionnalisation, d’entretiens professionnels, de certifications professionnelles et de validation des acquis de l’expérience.

Ce texte, publié le 2 avril 2020, entre en vigueur immédiatement.

Prolongation des formations engagées sous contrat d’apprentissage ou de professionnalisation…

Est autorisée la prolongation, par avenant au contrat initial, des contrats d’apprentissage et de professionnalisation dont la date de fin d’exécution survient entre le 12 mars et le 31 juillet 2020. Il s’agit de tenir compte de la suspension de l’accueil des apprentis et des stagiaires par les centres de formation d’apprentis et les organismes de formation.

Eu égard aux circonstances exceptionnelles liées à la crise sanitaire, l’activité de ces organismes ne peut pas s’exercer conformément au calendrier de l’alternance initialement prévu lors de la conclusion du contrat. Des sessions de formation et parfois des examens terminaux sont par conséquent reportés à des dates qui peuvent être postérieures aux dates de fin d’exécution des contrats. L’objectif est donc de permettre aux parties, si elles le souhaitent, de prolonger les contrats afin qu’ils puissent couvrir la totalité du cycle de formation.

… de même que la faculté permettant aux jeunes en CFA sans contrat d’apprentissage d’y rester inscrits

Il est également rendu possible de prolonger la durée pendant laquelle un jeune peut rester en formation dans un centre de formation d’ apprentis sous le statut de stagiaire de la formation professionnelle en attente de la conclusion d’un contrat d’apprentissage. En principe de 3 mois, cette période est rallongée à 6 mois, pour les personnes dont le cycle de formation en apprentissage est en cours à la date du 12 mars 2020, compte tenu des circonstances exceptionnelles liées à la crise sanitaire qui ne facilitent pas la recherche d’un employeur.

Report des échéances liées à l’entretien professionnel

L’ordonnance 2020-387 du 1er avril 2020 reporte les échéances liées à la mise en oeuvre de l’entretien professionnel. En effet, depuis la loi 2014-288 du 5 mars 2014 (JO 6) relative à la formation professionnelle, l’employeur doit obligatoirement faire bénéficier ses salariés d’un entretien professionnel périodique en vue notamment d’examiner leurs perspectives d’évolution. Un état des lieux récapitulatif est organisé au bout de 6 ans. En vertu de ce dispositif, les salariés qui étaient en poste à cette date et qui font toujours partie de l’effectif de l’entreprise aujourd’hui devaient bénéficier de leur entretien « bilan » avant le 7 mars 2020.

Pour tenir compte de la pandémie au Covid-19, l’ordonnance du 1er avril 2020 permet aux employeurs, par dérogation à l’article L 6315-1, II-al. 1 du Code du travail, de reporter les entretiens bilans jusqu’au 31 décembre 2020. Cette initiative appartient à l’employeur et non au salarié.

Dans le même temps, l’ordonnance supprime, pour la période courant à compter du 12 mars et jusqu’au 31 décembre 2020, les sanctions attachées au non-respect des délais de réalisation des entretiens récapitulatifs tous les 6 ans.

En effet, la législation actuelle prévoit que, dans les entreprises d’au moins 50 salariés, si le salarié n’a pas bénéficié, durant cette période de 6 ans, des entretiens obligatoires et d’au moins une formation autre que les formations dites « obligatoires », l’employeur est sanctionné : il doit verser un abondement correctif au compte personnel de formation de l’intéressé. À titre transitoire, jusqu’au 31 décembre 2020, il est également possible d’échapper à l’abondement correctif si le salarié a bénéficié de tous ses entretiens et d’au moins 2 des 3 mesures suivantes : action de formation, acquisition d’une certification, progression salariale ou professionnelle.

À compter du 1er janvier 2021, ces sanctions seront de nouveau applicables. Toutefois, pour apprécier leur mise en oeuvre, il faudra tenir compte de la date à laquelle l’employeur a procédé à l’état des lieux récapitulatif compte tenu du report du délai accordé.

À noter : Pour les salariés en télétravail, rien ne s’oppose à l’organisation d’un entretien en visioconférence.

Les organismes de formation ont jusqu’au 1er janvier 2022 pour obtenir leur certification

L’article 6, III, de la loi 2018-771 du 5 septembre 2018 prévoit une obligation de certification des organismes de formation (OF) à compter du 1er janvier 2021. Ainsi, en vertu des articles L 6316-1 à L 6316-3 du Code du travail, les OF financés par les fonds mobilisés dans le cadre des dispositifs de la formation (compte personnel de formation, projet de transition professionnelle, Pro-A, VAE, etc.) devront être certifiés par un organisme certificateur accrédité à cet effet ou par une instance de labellisation reconnue par France compétences. De leur côté, les organismes financeurs (opérateurs de compétences, associations Transition Pro, Caisse des dépôts et consignations, Pôle emploi, État, etc.) devront s’assurer de la qualité des formations effectuées par les OF en procédant à des contrôles.

Compte tenu des circonstances exceptionnelles liées à l’épidémie de Covid-19, l’article 1er de l’ordonnance prévoit de reporter au 1er janvier 2022 l’entrée en vigueur de ces dispositions. En effet, la procédure de certification des OF ne peut pas s’exercer conformément au calendrier initial, ces organismes ne pouvant plus accueillir du public depuis le 16 mars 2020. Il en va de même des organismes certificateurs et des instances de labellisation qui ne peuvent pas assurer normalement leur mission de certification dans un contexte où il est recommandé d’éviter les contacts présentiels.

Report de la date limite d’enregistrement des certifications dans le répertoire spécifique

La loi 2018-771 du 5 septembre 2018 a profondément réformé le régime national de la certification professionnelle, qui est inscrit, depuis le 1er janvier 2019, aux articles L 6113-1 à L 6113-10 du Code du travail. L’article 31 de cette loi a toutefois prévu que les certifications et habilitations recensées, au 31 décembre 2018, à l’inventaire mentionné à l’ancien article L 335-6 du Code de l’éducation, sont enregistrées de plein droit, jusqu’au 31 décembre 2020, dans le répertoire spécifique prévu à l’article L 6113-6 du Code du travail.

Le législateur prolonge d’un an la date limite à laquelle cet enregistrement automatique doit prendre fin. Autrement dit, les organismes certificateurs ont désormais jusqu’au 31 décembre 2021 pour faire enregistrer les certifications et habilitations dans le répertoire spécifique. Cette mesure a pour objet de permettre à France compétences de résorber de manière progressive le stock de demandes de renouvellement d’enregistrement en raison de la situation sanitaire en France.

Un dispositif de financement exceptionnel de la VAE

L’article 2 de l’ordonnance autorise les opérateurs de compétences (Opco) et les commissions paritaires interprofessionnelles régionales (associations Transition Pro) à financer de manière forfaitaire les parcours de validation des acquis de l’expérience (VAE), composés du positionnement du candidat, de son accompagnement à la constitution du dossier de recevabilité et de son passage devant le jury de validation.

Le montant du forfait de prise en charge financière doit être déterminé par les organismes financeurs, dans la limite de 3 000 €. Les Opco peuvent à cet effet mobiliser les fonds dédiés au financement de l’alternance ainsi que les contributions complémentaires collectées auprès des entreprises. Les associations Transition Pro peuvent quant à elles utiliser les fonds normalement destinés au financement des projets de transition professionnelle.

Ces dispositions, qui s’appliqueront jusqu’à une date fixée par décret (à paraître), et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2020, visent à faciliter l’accès à la VAE pendant la période de crise sanitaire durant laquelle les dispositifs de financement classiques (congé pour VAE, plan de développement des compétences, Pro-A) sont difficilement mobilisables. Selon le rapport au Président de la République, « la période de confinement peut en effet être l’occasion d’entreprendre ou de finaliser une VAE à distance, notamment pour les salariés placés en activité partielle, sous réserve que les modalités d’accompagnement et de financement soient adaptées ».

 

© Editions Francis Lefebvre – 2020