En principe, la liquidation judiciaire d’une entreprise est prononcée lorsque ses difficultés sont telles que son redressement est impossible. C’est pourquoi, à la différence des procédures de sauvegarde ou de redressement judiciaire, dont l’objectif est le maintien de l’activité, la liquidation judiciaire entraîne le dessaisissement du dirigeant de l’entreprise au profit du liquidateur judiciaire. Autrement dit, c’est le liquidateur qui exerce les droits et les actions de la société mise en liquidation judiciaire pendant toute la durée de la procédure. Mais qu’en est-il lorsqu’une entreprise placée en liquidation judiciaire reçoit directement le paiement d’une créance qu’elle détient sur un débiteur ? C’est la question à laquelle la Cour de cassation a récemment répondu.
Dans cette affaire, un commerçant avait été mis en redressement, puis en liquidation judiciaire. Quelque temps après, l’un de ses débiteurs, une société civile immobilière (SCI), avait effectué plusieurs paiements directement au commerçant pour un total de 113 620 €. Or dans la mesure où il était dessaisi de l’administration et de la disposition de ses biens, le commerçant n’aurait pas dû accepter ces paiements. Le liquidateur avait donc poursuivi la SCI et obtenu sa condamnation à lui payer la somme de 113 620 €. Pour refuser de payer une nouvelle fois, la SCI avait alors souligné que le liquidateur avait commis une faute car il connaissait l’existence de cette créance et qu’il avait pourtant omis d’en réclamer le paiement pendant 2 ans.
La Cour de cassation n’a toutefois pas retenu l’argumentation de la société. Elle a considéré, au contraire, que les paiements reçus directement par le commerçant étaient inopposables au liquidateur judiciaire et ce, peu important les éventuelles fautes commises par ce dernier dans l’exécution de sa mission. Par conséquent, la SCI a été condamnée à juste titre à payer une nouvelle fois la somme de 113 620 €. Sévère !
Remarque : dans cette situation, le débiteur peut agir en responsabilité civile contre le liquidateur à condition d’établir que ce dernier a commis une faute lui ayant causé un préjudice direct.